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Le peuple « LUMBU » ou « LOUMBOU »

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Masque Lumbu

 

Les Lumbu ou Loumbou occupent la savane de Tchibanga au sud de la Nyanga, le massif montagneux et forestier dit « Mayombe des Baloumbou » et la côte de la basse Nyanga ainsi que la lagune de Setté Cama et (avec les ViIi) dans les environs de Mayumba.

 

Sur le plan linguistique, les Loumbou se comprennent sans interprètes avec les Vili, Pounou de la Nyanga, Voungou, Eshira, Sangou.

 

Selon certaines sources, installés dans la région de Setté Cama, les loumbou sont venus de Mongo, du côté de Pointe-Noire, par la savane. Ils se divisèrent en Gango, demeurés dans la savane, et Baseri qui poursuivirent leur chemin le long de la Nyanga et s’installèrent dans l’actuel Gabon.

 

La tradition orale revèle ceci: « Les Pygmées (babongo), qui leur servaient d’éclaireurs, revinrent en leur disant: « Nous avons trouvé une grande rivière salée dont on ne voit pas l’autre bord. » Les loumbou s’établirent sur la côte. »

 

Certains pounou assurent que les loumbou sont venus en même temps qu’eux, d’autres le nient. La discussion n’a jamais connu de conclusion.

 

Les Loumbou ont survécu et vécu grâce à des techniques tels que la fabrication du sel. Par exemple, le sel, tiré de l’eau de mer par les ViIi et les Loumbou, fut à l’origine du commerce. L’eau de mer était évaporée pendant un jour, à l’origine dans des marmites, plus tard dans des neptunes (vases de cuivre peu profonds, de provenance européenne) ; le sel restant au fond était placé dans des paniers tressés de diverses dimensions: le ngandi pesait environ 3 kilos, le mbola 15, le dilamboulou (ou mousindi) 50. Les Bapounou venaient l’échanger contre des cabris, des pagnes de raphia, des marmites, et le revendaient dans l’intérieur, Les esclaves furent très tôt le principal objet d’échange, les pounou servant toujours d’intermédiaire. Les loumbou eux-mêmes se débarrassaient de leurs « crapules en les vendant aux Européens. Ils achetaient les esclaves de l’intérieur (hommes ou femmes) pour 20 à 30 mbola pièce; on n’achetait pas les enfants. Les marchandises européennes prirent, dans ce trafic, de plus en plus d’importance.

 

Le trafic avec les Européens était mené par les loumbou et surtout les Viii. Les esclaves avaient les mains fixées dans deux morceaux de bois. Les bateaux à voile mouillaient devant l’embouchure de la lagune. Dans les derniers temps du trafic, on mettait les esclaves dans des caisses pour les dissimuler. Par la suite le principal objet d’échange devint le caoutchouc et, en seconde place, l’ébène, l’ivoire, le raphia, les palmistes. Les commerçants indresa (anglais), bitanda (portugais), diamani (allemands) étaient installés à Igotchi (embouchure de la Nyanga) et à Mayoumba. On importait pagnes, outils, marmites, baril de rhum, bouteilles de gin, de genièvre et de « sit yone »(?). Le premier Français fut Brazza. Un poste fut fondé à Igotchi, puis à Mayumba. L’impôt consistait d’abord en une petite boule de caoutchouc, des cabris et des poules.

 

Les Loumbou avaient comme cultures: taro, bananes, igname en forêt; manioc, maïs, arachides en savane. Instrument : la matchette (moukouati) et la hache large de trois doigts (itali). Le riz de montagne date de 1914. La chasse se faisait surtout au piège et au fusil à pierre. Avec les pygmées (Babongo) du Mayombe, il y a symbiose, chaque chef de terre Loumbou ayant une troupe de pygmées et leur fournissant sel, manioc, pagnes en échange de produits de chasse. Autrefois les pygmées chassaient à l’arc (court) avec flèches empoisonnées, et à la sagaie. Puis ils ont adopté le filet. On brûle la savane en saison sèche pour renouveler l’herbe, pâture des animaux sauvages (antilopes, buffles) et pour les voir de loin. Pour la pêche on utilise soit des paniers c’ylindriques en bambou (idouba) poussés par les femmes, soit des nasses posées sur le fond avec trou en haut (troho). La pêche en mer, en pirogue, a presque disparu au profit des lagunes. Les forgerons utilisaient le fer acheté il la côte. Les femmes fabriquent encore des marmites et gargoulettes de terre cuite à dessins géométriques. Avec le bois on façonnait à l’herminette des pirogues, des mortiers, des plateaux longs et ovales et des cuillers. Les pièces de raphia, tissées par les hommes, devenaient, une fois cousues, des pagnes plus ou moins grands. Les enfants étaient nus. La maison, aux murs en écorce (mougana et mbounga), couverte de feuilles de palmier (gombo) avait des dimensions médiocres (3 m sur 2), avec une fenêtre dans le toit et deux portes se faisant face, pour se sauver en cas d’arrivée de l’ennemi (et, plus tard, des gardes). Les villages étaient très dispersés, chaque homme vivant souvent à part avec ses femmes et ses enfants. Société Famille matrilinéaire. L’héritage revenait à la famille maternelle. Quand le père est vivant, ses enfants habitent avec lui. A sa mort, s’ils sont jeunes, ils vont chez leur oncle maternel (katsi). La polygamie fleurit encore.

 

Exogamie de clan. Les Loumbou peuvent épouser des Pounou et des ViIi. Les clans sont nombreux : Bayendzi, Tchimondo, Basamba, Bagambo, Bayéma, Badoumbi, Oukongo, etc

 

Certains de ces clans ont leur correspondant chez d’autres peuples (pounou notamment); l’exogamie s’étend à eux. Au-dessus des chefs de clans existaient des chefs territoriaux (« rois ») pour régler, entre clans, les palabres graves (meurtres, incendies, sorciers, adultères) ; la cloche (kindi) servait à appeler les gens. Le chef portait alors un chasse-mouche en queue d’éléphant ou de buffle. On compensait le meurtre d’une femme en livrant une femme, celui d’un homme en livrant un homme; en cas de non remplacement, on coupait la tète du meurtrier. Le voleur qui ne pouvait rembourser devenait esclave du volé. Chaque clan possédait autrefois un territoire nettement défini; le chef de clan répartissait les terres à défricher. Les villages se déplaçaient en cas de morts nombreuses ou de brouilles de familles; sur l’emplacement on trouve parfois des manguiers, des papayers, des hananiers ; le village émigré garde son nom ancien.

 

Religion: Ni cosmogonie, ni culte des ancêtres n’ont été indiqués. La mort pouvait être attribuée à un sorcier. L’autopsie était pratiquée, on examinait les poumons, les boyaux, la rate; s’il y avait une lésion elle était due à un sorcier. Un voyant le reconnaissait dans un miroir. On faisait absorber à l’accusé le mboudou (écorce de bois amer) ; s’il tremblait, il élait coupable et on l’étranglait. Le Bouiti semble ancien, mais d’importation tshogo (les masques parlent dans celte langue). Le Mouiri, le Nyembé, le Moukouyé (danse sur échasses) sont aussi pratiqués.

 

Les devins guérisseurs (nganga) employaient surtout des écorces de bois (à boire ou à mettre sous sa couverture). Démographie La maladie du sommeil autrefois a décimé les Baloumbou ainsi que la lèpre et les empoisonnements. Beaucoup sont partis travailler à Pointe-Noire, Brazzaville, Dolisie, Port-Gentil. Ils reviennent quand ils sont vieux, ou pas du tout.

 

Propos recueillis en 1960 par Hubert Deschamps et retranscrit dans Traditions orales du Gabon

 

2 Réponses »

  1. Mon histoire, mon chemin.

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  2. « sit yone » (?) En réponse à cette interrogation, selon ce que je sais: siti c’est le pagne et yone c’es nouveau. En définitif, c’est: pagne nouveau.

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